samedi 30 mars 2013

Extrait 10 - écrit par Erika

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          Dès qu’Enola fut dans la pièce attenante, Lonan poussa fièrement Fly contre le mur et s’approcha sensuellement de son oreille. La jeune femme se laissa faire tout en déglutissant péniblement avant de sentir le corps de son soupirant trop près, bien trop près ! Elle était encerclée par les bras musclés de l’effronté.
     – Mon Petit Papillon, ça te tente qu’on mette à l’épreuve les « flammes de notre Amour » ? susurra-t-il d’une voix mielleuse masquant un sarcasme délibéré. J’ai bien envie de tester cette…
Avant même que Fly, outrée par cet affront, n’ait le temps de répliquer, une voix contrariée se fit entendre :
         – LONAN, sors de mon magasin TOUT DE SUITE ! (Le jeune homme se recula brusquement et Fly respira à nouveau.) Tant qu’Aponi ne maîtrisera pas ses dons, je t’interdis de la toucher. J’ai eu ma dose de visions salaces, je te rappelle que je suis un de tes derniers parents, alors cesse immédiatement de…
         – Mais c’était pour rigoler grand-mère, l’interrompit son petit-fils embarrassé qu’elle ait perçu ses paroles défiantes.
Mais comment fait-elle pour surprendre le moindre de nos faits et gestes ?


Enola se montra dans l’embrasure de la porte.
– Est-ce que j’ai l’air de rire moi, LONAN ? s’agaça la vieille femme qui avait les deux mains fermement posées sur ses hanches.
– Bon, je ferai mieux d’y aller moi ! lança-t-il ébranlé.
– Oui, je crois bien ! l’encouragea Enola furieuse.

Lonan salua courtoisement sa grand-mère, lui offrant un sourire repentant. Celle-ci ne pouvant rester fâcher après son enfant chéri, lui retourna son amabilité tout en hochant la tête et en grimaçant. Désormais dos à Enola, le jeune homme toisa Fly et des bouts des lèvres mima : « Je n’en ai pas fini avec toi. » Il lui fit un clin d’œil équivoque tandis qu’elle fronça les sourcils de dépit. Et il sortit sans aucun autre artifice.
Fly encore déroutée par les dernières longues minutes qui s’étaient égrainées, regardait Lonan s’éloigner sans bouger d’un iota. De nombreuses pensées contradictoires se précipitaient dans son esprit torturé. Celles-ci se télescopaient et seul l’ordre d’Enola y mit soudainement fin.
– Suffit Aponi ! gronda la vieille femme.
– Je vous demande pardon Madame ?
– Euh… tu comptes me servir du « Madame » pendant longtemps alors que je partage tes pensées les plus intimes PETIT PAPILLON ? demanda-t-elle d’une moue mutine en la charriant. (Les joues de Fly s’embrasèrent alors que des visions du petit-fils nu de son interlocutrice s’imposèrent à elle sans même qu’elle ne puisse les contrôler.) Mais vous êtes autant l’un que l’autre irrécupérables, ma parole ! pesta Enola qui assistait en direct à ce défilé d’images censurées. Bref, avant que tu ne t’égares une fois de plus mentalement dans les… bras, je préférerais dire dans les yeux, mais bon à ce stade, nous n’en sommes plus là ! Je disais donc avant que tu ne t’égares dans les bras aussi bien dans la réalité que dans tes pensées COQUINES, insista-t-elle tout en lui souriant de manière taquine, qu’il faut absolument que tu arrêtes de t’en vouloir Fly !
Cette dernière la considéra d’un air totalement contrit et peina à articuler :
– De quoi… de quoi parlez-vous… exactement Mad… Enola ?
– Voilà qui est mieux Petit Papillon ! affirma la vieille femme dont les anciennes traces de colère avaient totalement disparu de son visage. Ah sacré Lonan, il a toujours aimé jouer avec les mots !!! Je voudrais que tu cesses de t’en vouloir d’en vouloir… à mon petit-fils ! plaisanta-t-elle. Et dans tous les sens… si tu vois ce que je veux dire. Je sais bien que…
– Pardon ? la coupa sèchement Fly qui était de plus en plus mal à l’aise et déconcertée face à la teneur de cette discussion ahurissante.
– Disons que je sais bien à quel point mon petit-fils est attirant, aucune demoiselle de cette petite ville ne me contredira, ni d’ailleurs je pense !!! Donc, je comprends ton attrait mon enfant, mais…
– NON !!! Vous n’y êtes pas du tout, s’écria la jeune femme. Votre petit-fils ne m’attire PAS DU TOUT !!! brama-t-elle. Il est si… arrogant… si pénible… si sûr de lui… si agaçant… si contrar…
– Je te laisse continuer ? intervint Enola. Parce que tu as l’air bien parti pour me tenir le discours d’une pauvre femme éprise qui refuse de l’admettre et qui se décrit elle-même !!! Et comme je t’apprécie ma petite, je ne vais pas te laisser te ridiculiser de la sorte ! railla-t-elle.

Eh bé, si on m’avait dit qu’il existait des personnes âgées avec un tel sens de l’humour, je ne l’aurais pas cru ! songea Fly complètement atterrée par ces propos.
– Mais vous n’y êtes pas du tout, VOTRE PETIT-FILS, aussi beau et charmant puisse-t-il être, M’INSUPPORTE !!! hurla-t-elle alors qu’elle avait seulement soufflé le compliment physique. Et… sans vouloir vous offenser bien sûr !
– Bien sûr ma chérie ! rit la vieille femme. Tu ne crois pas que tu en fais un peu trop pour une femme désintéressée par un homme si VIL ?! Bref, je vais arrêter de te chiner avec tes sentiments car je voudrais te…
– Mes sentiments, éclata de rire Fly. Vous exagérez Enola, nous n’en sommes pas au mariage non plus !
Le regard de la vieille femme s’assombrit et elle murmura :
– Rassure-moi Aponi chérie, personne ne t’a encore parlé de la Prophétie ?
– Quelle Prophétie ?
– Celle qui pèse sur les épaules de notre peuple entier !
– Notre peupl… mais moi je ne suis pas…, bredouilla-t-elle avant de se reprendre. « Notre peuple » comme vous dites, pourquoi est-il en danger ? interrogea-t-elle la vieille femme avant d’enchaîner un questionnement interminable, sans attendre aucune réponse. Et puis bon sang, comment je fais pour pénétrer dans les rêves de votre petit-fils ARROGANT ? Pourquoi ne puis-je PAS m’empêcher de me rapprocher de lui alors qu’il représente tout ce que je déteste ? Pourquoi me fait-il cet effet alors que je n’ai pas pour habitude de me laisser séduire si facilement ? Pourquoi Amarok m’a regardée comme s’il me connaissait depuis toujours ? Pourquoi ai-je senti un lien presque aussi fort avec lui que je n’ai avec Lonan ? s’emporta-t-elle avant de marquer un temps d’arrêt. Enfin, ce n’est pas ce que je voulais dire ! Je n’ai AUCUN lien avec votre descendant ! Et ce prénom « Aponi » pourquoi me fait-il ressentir des sensations étranges à chaque fois que vous le prononcez ? Pour finir, pourquoi Taima me hait-elle autant alors que je sens une connexion spéciale entre nous ? POURQUOI ou COMMENT, je ne sais pas quelle est la meilleure question… Pourquoi je me sens liée à tous ces jeunes ainsi qu’à vous Enola alors que je suis arrivée il y a seulement trois jours ?! ET comment ça se fait ? protesta la jeune femme dont les grands yeux laissèrent échapper d’épaisses larmes.
– As-tu terminé ma chérie, ma chère Aponi ? la questionna Enola d’une voix bienveillante et d’un regard extrêmement puissant tout en se rapprochant d’elle pour la prendre dans ses bras.

L’appellation « Aponi » résonna dans les oreilles de la jeune fille et elle fut mentalement transportée au milieu d’un feu de camps nocturne, également éclairé par une lune pleine rayonnant d’un éclat doré.
Toutes les personnes que Fly avait croisées depuis son arrivée sur cette île extraordinaire étaient installées autour de cet ardent brasier. Bien que tous ses pairs devaient avoir une dizaine d’années en moins, elle les reconnut sans difficulté. Elle ressentit aussitôt un sentiment d’appartenance à ce groupe. Elle était extérieure à la scène et aucune âme ne sembla la remarquer malgré ses mouvements. Elle se déplaça alors pour mieux observer ce qui était en train d’avoir lieu.
Plusieurs indiens d’un âge avancé dont Enola, se tenaient debout face à cette assemblée et le plus ancien captivait son auditoire par ses paroles tenues dans une langue qui était inconnue à la jeune femme. Et pourtant, Fly comprenait parfaitement ce que proférait SON aïeul. Elle ne l’avait jamais rencontré et malgré tout, elle sut que c’était son grand-père paternel. Cet homme dont elle connaissait également la désignation – « Hiamovi » – était en train de raconter l’histoire de sa petite-fille « Aponi ». Celle-ci avait péri dix ans auparavant en même temps que ses grands-parents maternels dans un incendie. Toutefois, celle-ci reviendrait d’entre les morts puisque les Divinités avaient choisi de jouer ce tour à ce peuple, pour les sauver de la malédiction qui pesait sur la tribu et qui se révélerait à l’aube de l’hiver 2012…

La jeune femme fut brutalement arrachée à cette vision par Enola qui l’interpellait.
– Aponi… Aponi… Apponi !!! s’égosilla la vieille dame. (Fly ouvrit les yeux et arrima ses prunelles remplies d’interrogations à celles de son interlocutrice, néanmoins ne pipa mot !) Tu n’es pas censée apprendre la Prophétie de cette manière ma chérie. Nous devons y aller en douceur. Tu risquerais de ne pas le supporter. Tu as déjà été assez secouée depuis trois jours. Viens ! la somma-t-elle tout en la prenant délicatement par le bras et la dirigeant vers l’arrière-boutique. (Fly totalement désemparée et abasourdie, se laissa conduire sans même contester.) Je vais te préparer une tasse de thé mon Aponi et t’expliquer ce que tu as entraperçu…


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