lundi 13 mai 2013

Extrait 14 - écrit par Sia

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– Taï, t’es sérieuse là ?
– Oui.
– Lo devait être furieux !
– Pour être franche, c’est plutôt la miss je débarque regardez-moi qui était hors d’elle. Non, mais je t’assure Kiona. Elle s’est levée comme une furie et m’a hurlé dessus.
– Tu l’avais un peu cherché cette fois, répondit la jeune coiffeuse à son amie.
– Alors toi aussi tu es de son côté ! s’énerva Taïma.
– Ne sois pas bête, tu es mon amie… Je ne la connais même pas cette Aponi.

Taïma se laissa aller au massage du cuir chevelu que lui offrait son amie. De passer au salon de coiffure voir s’il y avait de la place pour elle, lui avait alors semblé être la meilleure idée de la journée. Il faut bien dire que les derniers jours n’avaient vraiment pas été des plus calmes pour la jeune femme. Cette ultime journée avait quand même été la pire de toute. Taï avait bien failli perdre son boulot. Tout en confiant sa tête à Kiona, elle se questionna sur les raisons qui avaient conduites Aponi à aller parler à son patron en sa faveur. Lonan le lui avait-il demandé ? L’avait-il obligée à aller voir son patron ? Oui, ça ne peut être que Lo…, pensa Taï. Et s’il l’a fait c’est qu’au fond de lui, il m’aime… Alors que la jeune fille laissait son esprit vagabonder vers des idéaux amoureux qui n’étaient possibles que dans son esprit, son amie coupait, façonnait, recoupait, égalisait ses cheveux. Lorsque Kiona eut enfin terminé sa coupe, elle sécha puis la coiffa. Taïma était toujours silencieuse, perdue dans les bras imaginaires de « son » Lonan. Elle imaginait tellement bien sa vie auprès de lui. Elle se voyait vêtue d’une magnifique robe blanche et s’avancer vers l’autel où il l’attendrait dans son costume gris, souriant, ému et aimant. Un peu plus tard elle lui offrirait le plus beau des cadeaux : des enfants. Deux… non, trois… oui trois enfants, deux garçons beaux et forts comme leur père et une petite fille qui aurait son regard espiègle et sa beauté à elle. Ils emménageraient dans une grande et belle maison près du lac perdu dans les bois. Lonan la rejoindrait le soir, à la nuit tombée. Il la prendrait dans ses bras et il…
– Taï… Taï… Taima !
– Oui ?!
– Ça te plaît ?
La jeune femme revint à elle et s’observa, sous toutes les coutures, dans le miroir. Kiona avait fait du très beau travail et elle trouvait sa nouvelle coupe vraiment parfaite. Elle lui donnait l’air dynamique, moderne et surtout, elle la vieillissait de quelques années. Exactement ce que Taima avait besoin.
– Merci Kio, c’est génial ! C’est exactement ce que je voulais. T’es la meilleure, ajouta-t-elle en serrant son amie dans ses bras.
– De rien ma belle. Je suis vraiment contente que ça te plaise.
– Avec ça, Lo ne pourra pas me résister lorsque…
Taima se tut, préférant garder ses plans pour elle. Son amie ne lui en voudrait pas, surtout lorsqu’elle la verrait heureuse et comblée avec le petit ami le plus craquant du monde.
– Je dois y aller maintenant, je t’appelle plus tard.
– Ok Taï. Tu passeras payer à la fin du mois comme d’habitude ?
– Oui, oui.

La jeune femme sortit du salon en flottant comme sur un nuage. Aussi légère qu’une plume, elle quitta l’île pour rejoindre la petite boutique de lingerie qu’elle avait découverte lors de son dernier passage dans la ville portuaire. Taima entra et flâna dans les rayons à la recherche d’une tenue bien précise. Ça faisait un moment qu’elle l’avait repérée et qu’elle voulait l’acheter, mais jusqu’à maintenant elle n’avait pas eu une réelle raison de le faire. Maintenant que Lonan avait prouvé qu’il l’aimait, elle en avait une.

– Bonjour, est-ce que je peux vous aider ?
– Bonjour. Oui, je cherche une petite nuisette de dentelle blanche que j’ai vue la dernière fois que je suis venue.
– Oui. Suivez-moi, je vais vous montrer les modèles que nous avons.
– Celle que j’ai vu était transparente et avait un petit lien resserrant le tissu sous la poitrine se terminant par une plume.
– Je vois le modèle en question… elle était entièrement fendue sur le devant et était assortie d’un string assorti ?
– Oui, c’est exactement ça.
La vendeuse accompagna Taima devant le modèle en question et lui proposa de l’essayer.


Lonan venait de quitter la ferme des Bakers et se dirigeait vers l’épicerie pour y acheter de quoi préparer un bon dîner. Il n’était pas un roi des fourneaux, mais il voulait prouver à son délicieux petit papillon qu’il en était capable. Il voulait que tout soit parfait ce soir. Lonan espérait aussi que rien ni personne ne viendrait les interrompre cette fois. Tout en faisant ses achats, il s’imagina vivre la soirée parfaite avec Aponi. Il était tellement attiré par cette jeune femme qu’il en oubliait cette manière agaçante qu’elle avait de le remettre à sa place et de lui tenir tête. Lonan voulut l’appeler pour savoir ce qu’elle aimait, mais en portant la main à sa poche, il s’aperçu qu’il avait dû l’oublier dans sa voiture ou au cabinet.
En quittant le magasin, Lonan passa récupérer son téléphone et rentra chez lui. Il se stationna près de la porte, sortit les courses de son coffre et pénétra dans sa maison. Il déposa ses sacs sur le comptoir de la cuisine. Un bruit attira son attention. Lonan tourna la tête et s’aperçu que des pétales de fleurs formaient un chemin de son salon vers sa chambre. Fly est-elle déjà là ? s’interrogea-t-il tout en suivant la route improvisée. Il arriva devant sa chambre, tout était sombre, les volets avaient été fermé.
– Aponi ?
Lonan n’eut aucune réponse.
– Fly ? interrogea-t-il en espérant avoir une réponse.
– Hmm.

Lonan avança vers le murmure qu’il identifia venir de son lit. Il s’imagina que son petit papillon lui avait préparé une petite surprise. Il ôta son tee-shirt, le laissa tomber à ses pieds et avança. Il tâtonna jusqu’à ce que sa main touche quelque chose. Il sentit la peau chaude et douce d’une jambe. Il remonta son geste. Elle avait les jambes nues. Lonan était aux anges. Cette fois il en était certain, personne ne les empêcherait lui et son papillon de se donner l’un à l’autre. Il monta sur le lit et ses mains partirent à la découverte du corps qui s’offrait silencieusement à lui. Il trouva enfin une fine couche de tissus. Il le parcourut afin de se faire une idée de la tenue, qu’il imaginait sexy, d’Aponi.

– Merci pour la surprise ma belle.
Pour seule réponse, deux mains se posèrent sur lui et l’attirèrent. Lonan ne se laissa pas prier et se mit au dessus de ce corps qu’il rêvait de posséder. Il baissa la tête à la recherche des lèvres de sa belle. Lorsqu’il les trouva, il déposa les siennes dessus et offrit un merveilleux baiser à celle qu’il désirait temps. Quelque chose le surprit. Il ne reconnut pas la manière d’embrasser de son petit papillon. Lonan l’embrassa à nouveau, mais non, il ne ressentait strictement rien. Il se redressa.
– Tu ne veux pas qu’on mange un bout avant d’aller plus loin ?
Une fois de plus, il n’eut aucune réponse. Ce silence était étrange. Il tenta à nouveau de faire parler sa belle tout en se demandant à quoi pouvait bien jouer Aponi. Il fini par se levant voyant que la jeune femme se murait dans son mutisme. Alors qu’il allait allumer la lumière, une main attrapa son poignet, le retint et des lèvres se posèrent sur les siennes pour lui offrir un baiser des plus torrides. Lonan déposa ses mains sur les hanches de ce corps offert et se rendit compte que ce n’était pas celle qui croyait. Ce n’était pas Aponi. Il n’eut toutefois pas l’occasion de réagir avant que la lumière ne s’allume et ne lui dévoile le visage de celle qui s’était jouée de lui.
– Taï ! Mais…
– Je dérange ! s’exclama Aponi qui venait d’allumer et de découvrir Lonan dans les bras d’une autre.
– Apo…
– Tais-toi ! Economise ta salive.
Aponi tourna les talons et quitta la chambre.
– Toi, tu ne paies rien pour attendre. Sors de chez moi et n’y reviens plus.
– Mais je…
– Tu n’existes plus pour moi Taima. Pars et ne reviens plus, ajouta Lo en courant pour rattraper Aponi.
Cette dernière venait juste de monter dans sa voiture. Lonan n’eut d’autre choix que de se planter devant le véhicule, pour l’empêcher de partir sans qu’ils s’expliquent.
– Pousse-toi de là !
– Laisse-moi t’expliquer.
– Il n’y a rien à ajouter, retourne avec ta copine.
– Aponi, c’est une erreur.
– Vous êtes tous les mêmes, pas un pour rattraper l’autre. Laisse-moi m’en aller ou je te roule dessus.
Aponi avança la voiture et Lonan ne put que se mettre sur le côté et la regarder s’éloigner complètement dépité. Un mouvement attira son attention. Taima se tenait devant la porte de la maison, le regard triste. Une violence incroyable s’empara de lui et il préféra fuir afin de se calmer plutôt que de dire ou faire quelque chose qu’il regretterait.


Taima retenait ses larmes. Lonan venait de partir en courant dans les bois et semblait vraiment furieux après elle. Cette fois-ci elle avait la douloureuse sensation qu’elle l’avait définitivement perdu. On était pourtant si bien avant qu’Aponi ne vienne tout gâcher, pensa-t-elle. Taima rentra récupérer ses affaires. C’est avec regret qu’elle passa son jeans par-dessus son déshabillé. Elle semblait tant plaire à Lo dans cette tenue. Elle était tellement en colère après celle qu’elle considérait comme sa rivale qu’elle décida qu’Aponi ne perdait rien pour attendre. Si elle ne pouvait avoir Lonan, cette intruse ne l’aurait pas non plus, prophétie ou non. Taï sécha ses larmes du revers de la main et quitta la maison. D’une manière ou d’une autre, elle comptait bien se venger.

Aponi ne voyait pas la route défiler. Elle arriva chez elle saine et sauve par on ne sait quel miracle tant ses yeux étaient mouillés de larmes et sa vision brouillée. Une fois de plus elle avait fait confiance à un homme et une fois de plus il l’avait trompée. Comment ai-je pu être aussi idiote ? Comment ai-je pu lui faire confiance ? s’interrogea-t-elle en boucle. Aponi s’en voulait tout autant qu’elle haïssait Lonan. Elle entra dans la maison et monta directement dans sa chambre sans même voir Lucie et Ian installés dans le salon. Aponi claqua la porte derrière elle et se jeta sur son lit pour pleurer toutes les larmes de son corps. Elle se sentait tellement seule, tellement blessée, tellement humiliée… Épuisée par sa tristesse et ses pleurs, elle finit par sombrer dans le sommeil.


Il faisait presque nuit. La forêt était sombre et inquiétante. Aponi discerna deux silhouettes et se dirigea discrètement vers elles. Elle reconnut aussitôt Enola, avec une vingtaine d’années en moins, tenant un bébé sans ses bras, mais pas l’autre femme qui était de dos. Aponi ne pouvait voir que ses longs cheveux ébène. Elle s’approcha un peu plus afin d’entendre leur conversation.
– Maintenant qu’ils sont morts, il faut mettre l’enfant en sécurité.
– Oui Enola, répondit. C’est tellement triste.
– Je sais. Ne t’en fais pas pour elle, je lui ai trouvé des parents parfaits. Ils sauront prendre soin d’elle jusqu’à ce qu’elle soit en âge de revenir et d’accomplir la prophétie.
– Tiens Chenoa, prend là et conduit là sur le continent. Jane et Paul t’attendront à l’embarcadère. Courage, nous serons bientôt sauvés.   
– Comment les reconnaîtrai-je ?
– La femme, Jane, n’est pas très grande. Elle est blonde et son regard comme l’océan. Paul, son époux, est grand, ses cheveux coupés courts sont blond foncé et ses yeux bleu azur. Tu ne pourras pas les rater je t’assure. Aller, file, il est temps.

Aponi vit Enola tendre le bébé à l’autre femme qui le blottit aussitôt contre elle avant que toutes deux ne partent dans une direction différente, laissant la jeune femme seule dans les bois. Étrange, pensa Aponi, Enola n’est pas venue me parler. Se pourrait-il que je sois dans le rêve de quelqu’un d’autre ? Qui pourrait penser à cette scène ? L’autre femme peut-être, conclut-elle avant qu’un mouvement n’attire son attention.
– Qui est là ?
Aponi n’eut aucune réponse.
– Répondez…
Des pas se firent entendre sur les feuillages. Il y avait bien quelqu’un, mais qui ? Aponi était effrayée. Elle avait l’étrange sensation qu’on l’observait et elle n’aimait pas ça.
– Qui est là ?
Une main se posa et accrocha l’épaule d’Aponi.

– Fly ! Fly !
La jeune femme se réveilla et son regard encore rougi par les larmes se posa sur Lucie.
– Tu as de la visite…
– Je ne veux voir personne !
– Mais…
– Lucie, s’il te plaît. J’ai vraiment besoin d’être seule.
Son amie quitta la chambre en refermant la porte derrière elle. Fly se leva et se dirigea vers la fenêtre. Elle observa la nuit étoilée, se demandant qui pouvait bien être dans les bois près d’elle ? Qui l’avait agrippée ? Était-elle en danger ? Autant de questions qui tournaient en boucle dans son esprit. Lorsque Fly baissa les yeux, elle vit la voiture de Lonan. C’était sûrement lui qui voulait la voir. À cette pensée, son cœur se serra et elle se remit à pleurer. Caché par les sanglots de la jeune femme, Lonan entra dans la chambre sans qu’elle le remarque et s’approcha d’elle. En sentant sa main sur son bras, Fly se retourna et le gifla.


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